Dans le préambule du document de présentation du Projet de Loi de Finances de l’année 2023, le ministère des Finances et du Budget prend beaucoup de précautions oratoires pour expliquer comment les crises externes ont impacté l’économie du Sénégal. La crise du Covid-19, les changements climatiques, la guerre russo-ukrainienne, les tensions sur le marché du pétrole, l’inflation sont cités comme les principaux facteurs exogènes à prendre en compte dans l’exécution du budget 2023.

Surfant sur la crise du Coronavirus, le Gouvernement sénégalais anticipe sur de nouvelles crises sanitaires. « Aujourd’hui, sans être totalement vaincue, la maladie (Covid-19) demeure plus ou moins sous contrôle dans la majorité des Etats de la planète, à commencer par le Sénégal dont la gestion de la pandémie est présentée comme un modèle du genre. Mais une réalité inquiétante a fini par s’imposer, sur laquelle les spécialistes sont globalement d’accord : l’humanité devra faire face à d’autres pandémies mondiales dans le futur, à des intervalles de temps de plus en plus rapprochés, conséquence de notre évolution génétique mais aussi de la transformation de notre environnement, de nos habitudes alimentaires et, plus généralement, de nos modes de vie », indique le ministère des Finances et du Budget dans le document parvenu à PressAfrik.

Ainsi, ajoute le PLF 2023, « L’Etat est obligé d’en tirer toutes les conséquences en renforçant et en adaptant sans cesse le système de santé » et « d’allouer davantage de ressources à la recherche sur les maladies infectieuses et virales ; de recruter encore plus de médecins, d’infirmiers et de sages-femmes ; de relever le niveau du plateau médical ; de construire des établissements de santé de dernière génération ; de produire soi-même tous les médicaments essentiels non brevetés ».

Gérer la pluviométrie imprévisible

Les inondations ont englouti sans réel impact sur la situation des populations impactées, les 700 milliards du fameux plan Orsec. Mais ce n’est pas suffisant. Elles vont encore engloutir une bonne part du budget 2023. « Au Sénégal, le changement ou dérèglement climatique fait payer un lourd tribut à nos réseaux d’assainissement débordés, à nos villes dont l’expansion est difficile à maîtriser, tant la démographie va plus vite que les plans d’urbanisme, mais aussi à nos paysans, victimes, parfois, d’une pluviométrie imprévisible. C’est pourquoi le changement climatique représente un défi budgétaire colossal, lié notamment à la prévention et à la lutte contre les inondations, à la maîtrise de l’eau dans l’agriculture, à l’entretien des infrastructures routières et à l’assainissement de notre cadre de vie », lit-on dans le document de présentation du PLF.

La guerre russo-ukrainienne déclarée seule coupable de l’inflation

Pour ce qui est de la hausse vertigineuse des prix dans tous les domaines, il y a un coupable désigné: la guerre russo-ukrainienne. « Le conflit russo-ukrainien a enfin agi comme un évènement aggravant des perturbations des chaines d’approvisionnement et des tensions inflationnistes, en excluant, de fait, des marchés des matières premières agricoles et énergétiques, deux des plus grands producteurs mondiaux. Presque partout, les prix des biens de consommation courante mais aussi des équipements et intrants industriels sont montés en flèche, avec notamment des conséquences très sévères sur le pouvoir d’achat des ménages. Le Sénégal n’échappe hélas pas à ce phénomène mondial, obligeant l’Etat à réagir rapidement et vigoureusement, d’où l’adoption de la loi n°2022-19 du 27 mai 2022 portant loi de finances rectificative (LFR) pour l’année 2022. A la fin du mois de juillet 2022, l’inflation s’élevait à 11% en glissement annuel, notamment expliquée par la hausse des prix alimentaires de 17,2% en un an ».

Et pour faire face à ce facteur exogène, le Gouvernement du Sénégal annonce un « combat » contre la vie chère et la restauration du pouvoir d’achat des ménages dans le projet de budget 2023. « À cause des chocs exogènes, la tension inflationniste devrait perdurer et s’accentuer en 2022 atteignant 8,7% selon les prévisions économiques. Les facteurs à l’origine de l’inflation n’ayant pas disparu, le Gouvernement entend continuer à protéger les Sénégalais contre ses effets les plus néfastes, un choix clairement affiché par le projet de budget 2023. En effet, le combat contre la vie chère et la restauration du pouvoir d’achat des ménages doit être engagé », annonce le PLF.

Aussi, les tensions sur le marché du pétrole avec le prix du baril du pétrole qui s’établissait à 86 USD  la date du 27 septembre 2022 et le cours du dollars qui « s’est considérablement apprécié jusqu’à dépasser en valeur l’euro (1 EUR = 0,96 USD au 27 septembre 2022), monnaie à laquelle le franc CFA est arrimé par un système de parité fixe » expliquent, selon le gouvernement, « des tarifs d’électricité plus élevés, un carburant plus onéreux, un renchérissement des coûts de transports internationaux, des charges accrues pour la plupart des entreprises (qu’elles seront obligées de répercuter sur les prix de leurs propres produits), une baisse du pouvoir d’achat des ménages, en résumé : une dégradation de la conjoncture économique et des conditions de vie des ménages, dont certains peuvent être entrainés dans la précarité ».

La hausse des recettes fiscales et de la dette pour booster le budget 2023

Pour gérer les différentes crises énumérées ci-dessus, le Gouvernement du Sénégal compte surtout sur une hausse des recettes fiscales de plus de 400 milliards CFA facilitée en grande partie par Stratégie des Recettes à Moyen Terme (SRMT), qui fédère et coordonne l’action des services de l’Etat pour une mobilisation efficiente des ressources publiques. « Les recettes fiscales sont projetées à 3 486,7 milliards de FCFA dans le projet de loi de finances de l’année 2023, contre 3 052,1 milliards FCFA dans la loi de finances rectificative (LFR) de 2022, soit une hausse de 434,6 milliards FCFA en valeur absolue et 14,2% en valeur relative », lit-on dans le document.

Mais également, une hausse de la dette qui va passer de 350 milliards FCFA dans la Loi de Finance Rectificative (LFR) 2022 à 424,32 milliards FCFA dans le PLF 2023, soit une hausse de 74,3 milliards FCFA. « C’est un poste budgétaire important mais c’est aussi l’expression d’un choix de politique économique. Le Sénégal continue de bénéficier de la confiance de la communauté financière internationale et présente un profil de risque modéré grâce à une gestion prudente de son endettement, ses performances économiques avec des taux de croissance appréciables, la bonne tenue de ses finances publiques et la qualité de ses politiques publiques qui le placent sur la voie de l’émergence », explique le ministère des Finances et du Budget. Qui ajoute, avec ses chiffres, que le Sénégal s’endette moins que par le passé.*

Les investissements vont baisser

Dans le projet de loi de finances pour l’année 2023, le Gouvernement annonce que les dépenses d’investissement vont baisser de 165,6 milliards de FCFA par rapport à la LFR 2022, passant de 1 753,8 à 1 588,2 milliards FCFA.  Selon le ministère des Finances et du Budget, « une telle baisse peut surprendre, tant au cours de la décennie écoulée, le Gouvernement avait porté l’investissement public à des niveaux historiques ».

Après, entre autres investissements réalisés, « 2526 kilomètres de routes; 189 kilomètres d’autoroute; 6673 kilomètres de pistes rurales pour désenclaver les territoires de l’intérieur, 5301 sur 20977 villages et hameaux électrifiés; 35 897 salles de classe, 64 daaras modernes, 5 instituts supérieurs d’enseignement professionnel (ISEP) et 14 espaces numériques ouverts (ENO) ; 9 nouveaux hôpitaux, 18 centres de santé, 300 postes de santé et 21 centres de dialyse ; le TER; le nouvel aéroport international de Saint-Louis; les stades de Basket-ball (Dakar Arena) et de Football (Stade du Sénégal Président Abdoulaye Wade) », le Gouvernement compte baisser le volume des dépenses d’investissement pour faire un ciblage.

Les chiffres du budget 2023

Globalement, le taux de croissance du PIB est projeté à 10,1% en 2023 contre une prévision de 4,8% en 2022. Cette croissance serait entièrement tirée par le secondaire ou industriel (+22,4%) et, dans une moindre mesure, par les secteurs primaire (+4,9%) et tertiaire (+6,7%), selon le document de présentation du PLF 2023.

Les recettes internes du budget général sont prévues dans la loi de finances pour l’année 2023, à la somme de 3 640 481 000 000 de FCFA conformément à l’annexe I de la présente loi.; Les dons budgétaires et en capital sur recettes externes du budget général sont prévus dans la loi de finances pour l’année 2023, à 278 990 000 000 de FCFA; Les recettes totales du budget général sont ainsi prévues, pour l’année 2023 à 3 919 471 000 000 de FCFA.
Les ressources de trésorerie du budget de l’Etat sont évaluées à 2 345 083 000 000 FCFA. Sans oublier que le budget 2023 enregistre des recettes fiscales et non fiscales provenant de l’exploitation des hydrocarbures d’un montant de 51,6 milliards FCFA répartis, conformément à la loi portant sur les hydrocarbures, dont 33,7 milliards FCFA pour le budget général et 17,9 milliards FCFA pour les comptes spéciaux du trésor suivants : Fonds intergénérationnel : 5,2 milliards FCFA ; Fonds de stabilisation :12,7 milliards FCFA. Globalement le budget est projeté à 6264 Milliards FCFA pour l’année 2023.

Les autorisations d’intervenir sur les marchés sont arrêtées à 2 345 083 000 000 de FCFA. Le document stipule que ces emprunts pourront être contractés soit sur le marché national, soit sur le marché extérieur auprès de pays ou organismes étrangers et auprès d’organismes internationaux, à des conditions fixées par décret ou par convention.

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