« En temps de guerre, la vérité est si précieuse qu’elle devrait toujours être protégée par un rempart de mensonges » a dit Winston Churchill. Il n’est donc pas surprenant que les bombes écrasent Kiev et pulvérisent la vérité sous un nuage de mensonges.
Même occultée ou occise par le fatras des allégations et des réflexions véhiculées par les médias, l’évidence fait de l’Ukraine, pays politiquement souverain, une excroissance géographique et un glacis stratégique qui conditionnent la sécurité ou la vulnérabilité de la Russie.
Cet axiome-là n’échappe évidemment pas au Colonel Poutine (officier du renseignement) rompu à la tâche. Tâche qui consiste à apprivoiser la prévision et à domestiquer la prospective. D’où son offensive militaire contre l’Ukraine du Président Volodymyr Zelensky imprudemment enchanté et envouté par les sirènes de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (Otan).
L’attractivité économique de l’Union Européenne est compréhensible ; mais l’adhésion forcément inamicale à un Pacte militaire comme l’Otan constitue une escalade provocatrice en direction de Moscou. Le Président de la république ukrainienne et ses amis occidentaux ont-ils voulu tester la solidité des nerfs de Vladimir Poutine ?
La réponse est là, à l’état brut et brutal sous nos yeux : un orage d’acier et de feu déclenché par Poutine qui n’est pas un pope, c’est-à-dire un prêtre de l’Église orthodoxe russe. Il est clair que les couvées du KGB ne façonnent pas des prélats mais des panthères de neige.
Déjà, Vladimir Poutine avait dressé des pare-feu autour de la Russie, en verrouillant méthodiquement les Baltes : récupération de la Géorgie en 2008, vassalisation de la Crimée en 2014 et des visées de finlandisation voire d’occupation de l’Ukraine en 2022.
Au demeurant, quel est le chef d’État responsable qui accepte, sans broncher, des missiles aux portes de son pays ? Existe-il un Président qui peut accepter, au saut du lit, de poser ses pieds sur des pétards à fortiori des ogives nucléaires ? De façon terre à terre, même le chef de quartier de Diamaguène, à Dakar, ne tolère pas qu’on enterre un arsenal au seuil de la porte de sa maison.
Les bégaiements de l’Histoire sont curieusement répétitifs. En octobre 1961, le Président de l’Union Soviétique, Nikita Khrouchtchev, avait, dans des conditions similaires, testé les nerfs de John F Kennedy, jeune Président des États-Unis, fraichement élu. Moscou voulut installer des fusées à quelques encablures de la Californie. La vigoureuse réaction de Washington qui ordonna à l’US Navy et à la Strategic Air Command (basée à Fort-Bragg) d’établir une double zone d’exclusion aérienne et maritime stoppa net l’action du Président de l’ex-URSS. On frôla la guerre atomique.
Plus près de nous, l’arrivée d’un bataillon de l’armée angolaise à Bissau, à la demande l’ancien Premier ministre Carlos Gomez Junior (nous sommes en 2010) avait alarmé le gouvernement du Sénégal et donné un supplément de travail aux Services de renseignement. Surtout que les militaires angolais avaient progressé vers l’Est de la Guinée-Bissau, en réfectionnant la garnison de la ville de Gabou, sur l’axe qui conduit vers Pirada et la frontière sénégalaise.
Question : est-ce que le Sénégal serait calme et amorphe si 1000 soldats cubains débarquaient en Gambie, pourtant pays souverain ? Trois jeunes et valeureuses figures de la presse sénégalaise (Yoro Dia, Cheikh Yérim Seck et Barka Ba) ont l’habitude de dire : « La Gambie est une question de sécurité nationale pour le Sénégal ». Voilà qui apporte de l’eau au moulin de Poutine en Ukraine !
Et l’on comprend fort bien l’abstention du Sénégal à l’ONU. Le Président Macky Sall ne peut pas se mettre en porte-à-faux avec sa propre doctrine qui chevauche celle de Poutine en Ukraine.