Le Brésil a assumé la présidence du G20 en novembre 2023, en donnant la priorité à la réforme de la gouvernance mondiale et à la lutte contre la faim, la pauvreté et les inégalités. La société civile et les secteurs économiques ont œuvré pour que ces priorités soient fortement axées sur le climat. Le gouvernement brésilien lui-même a joué un rôle clé dans cet effort en créant le groupe de travail sur le changement climatique et en mettant l’accent sur les négociations relatives aux questions d’environnement et de biodiversité. L’objectif de faire de ce sommet le « G20 du climat » a été relativement atteint.

En termes de format, le G20 au Brésil s’est caractérisé par un agenda technique et ministériel mené dans presque toutes les régions du pays. Des efforts considérables ont également été déployés pour promouvoir la participation sociale, en créant de nouvelles plateformes de plaidoyer telles que F20 (Favela 20) et le G20 social, ainsi que de nombreux événements impliquant des chefs d’entreprise, des universitaires et des représentants de la société civile. Certains analystes ont souligné que la participation sociale était la marque de fabrique de la présidence brésilienne.

La mesure dans laquelle cette participation a influencé les agendas de négociation est discutable, car ces arènes sont généralement moins ouvertes à la contribution du public. L’effort de participation sociale a nécessité un investissement substantiel, similaire à l’approche de l’Inde en 2023. Il est peu probable que la présidence sud-africaine suive cette voie, les interlocuteurs indiquant un programme plus allégé et plus fermé avec moins de mouvements territoriaux pour 2025.

La plupart des analystes qui ont fourni des évaluations publiques du G20 au Brésil soulignent le rôle conciliateur de l’hôte dans un environnement de tension entre les membres du groupe, marqué par des guerres en Europe et au Moyen-Orient et des conflits commerciaux intenses tels que ceux qui opposent la Chine et les États-Unis.

Résultats attendus en matière de climat

Ce résumé regroupe les résultats de l’agenda climatique en trois axes principaux : la fiscalité internationale, le financement du climat et l’ alliance contre la faim et la pauvreté.

Fiscalité internationale et taxation des super-riches

La deuxième priorité du Brésil à la tête du G20 était l’imposition progressive des grandes fortunes, présentée comme un moyen de réduire les inégalités, de renforcer la viabilité budgétaire et de financer divers aspects de l’agenda climatique. Un consensus sur l’imposition des super-riches a été atteint en termes généraux lors des réunions de juillet, dans le respect de la souveraineté fiscale de chaque pays. Le ministre des finances Fernando Haddad a comparé les prochaines étapes de l’imposition des grandes fortunes aux autres piliers de la réforme fiscale de l’OCDE, notant que certains pays avaient déjà pris les devants dans ces piliers en établissant des lois nationales pour réglementer l’imposition équitable des multinationales et qu’il devrait en être de même pour l’imposition des grandes fortunes, qui constituerait le troisième pilier.

La future présidence du G20, dirigée par l’Afrique du Sud, a déjà indiqué son intention de poursuivre ce programme brésilien.

M. Haddad a également souligné l’importance d’augmenter le financement de la lutte contre le changement climatique afin de promouvoir des transitions énergétiques rapides et équitables alignées sur la protection de la biodiversité. Il s’est personnellement investi dans l’approbation de cette taxe dans le cadre d’une réforme globale de la fiscalité nationale, mais le Congrès a rejeté la mesure à la fin du mois d’octobre. La taxe était présentée comme visant toutes les personnes fortunées (et pas seulement les milliardaires) et comme un amendement à un projet de loi portant sur d’autres taxes. Avec cette défaite, la question devrait devenir un projet de loi autonome, bien que des difficultés d’approbation soient attendues.

Financement de la protection du climat et de la nature

Lors de la réunion ministérielle du G20 en septembre, les pays se sont mis d’accord sur les priorités en matière de climat et de développement durable proposées par le Brésil. Le groupe s’est engagé à faire face à la crise climatique et à ses effets, en soulignant la nécessité d’une coopération et d’un financement internationaux accrus. La déclaration met l’accent sur le soutien à l’adaptation au climat, à la protection des océans, au paiement des services écosystémiques et à l’économie circulaire, en promouvant une transition durable qui inclut les femmes, les communautés traditionnelles et les peuples autochtones. En outre, les pays membres ont réaffirmé leur engagement à mobiliser les ressources et les technologies pour le Sud.

Bien que cet ordre du jour interagisse avec la discussion principale de la COP29, il est peu probable que le G20 exerce une influence aussi directe sur les négociations de la CCNUCC que celle observée en 2023 avec le G20 de l’Inde. La présidence indienne est parvenue à dégager un consensus sur le triplement des énergies renouvelables et le doublement de l’efficacité énergétique, un langage qui a ensuite été adopté lors de la COP28 à Dubaï la même année.

Deux facteurs expliquent le moindre impact en 2024 : 1) la simultanéité du G20 à Rio de Janeiro et de la COP29 à Bakou ; 2) l’absence chronique d’accord minimum pour négocier le NCQG, principal sujet de la COP Climat 2024. La présidence brésilienne a cherché à démontrer qu’elle n’utiliserait pas le G20 pour faire avancer les négociations d’autres forums, mais pour trouver des solutions supplémentaires susceptibles de renforcer les discussions dans ces arènes.

Les résultats attendus en matière de climat ont été organisés au sein du groupe de travail sur le changement climatique créé par la présidence brésilienne du G20 et par l’intermédiaire des groupes du G20 existants axés sur la durabilité du climat (ECSWG) et la finance durable (SFWG). Alors que le groupe de travail ne devrait pas être maintenu sous la présidence sud-africaine, l’ensemble des actions directement ou indirectement liées au climat et à la nature réalisées en 2024 bénéficie d’un fort soutien de la part du gouvernement sud-africain, selon les diplomates brésiliens.

  • Réformes institutionnelles

Sous la direction du Brésil, le G20 a progressé dans les réformes des institutions multilatérales (FMI, Banque mondiale, OMC, ONU, etc.), bien que ce programme se heurte à la résistance des pays qui bénéficient de la hiérarchie actuelle.

Toutes les présidences du G20 dirigées par des pays du Sud (Indonésie, Inde, Brésil et bientôt Afrique du Sud) ont mis l’accent sur les réformes structurelles, y compris les institutions financières. Cependant, le sujet est confronté à des défis en raison des déséquilibres de pouvoir dans la gouvernance de l’architecture financière internationale.

Dans le cas de la réforme des banques multilatérales, le Brésil a proposé de créer une feuille de route, présentée comme le principal résultat du G20 en 2024. Il reste à voir si le soutien des actionnaires à l’agenda global se reflétera dans la phase de mise en œuvre et la fourniture de ressources supplémentaires.

Le soutien à l’imposition des ultra-riches et à la Convention des Nations unies sur la coopération fiscale internationale reflète les progrès significatifs réalisés par la présidence brésilienne, qui cherche à rendre l’agenda plus équitable et plus inclusif.

L’un des principaux points des réunions de ce G20 a été la lutte contre les inégalités, comme en témoigne l’accent mis sur la coopération fiscale internationale et l’imposition progressive. Toutefois, les engagements en faveur du financement de la lutte contre le changement climatique ont été limités, se concentrant sur les transferts volontaires de technologie et la mobilisation des ressources internes, sans lien direct avec des questions telles que l’allègement de la dette ou l’allocation de droits de tirage spéciaux (DTS).

Le dernier communiqué avant le sommet a réaffirmé le besoin urgent de réformes dans les banques multilatérales de développement (BMD), soutenant la feuille de route du G20 pour les rendre plus efficaces. Le document aborde également la nécessité de restructurer les quotes-parts du FMI et de procéder à une solide reconstitution des ressources de l’IDA, en insistant sur le soutien à la révision des politiques de surtaxe afin d’alléger le coût des prêts pour les pays bénéficiant de programmes du FMI. Le rapport souligne également l’absence de progrès significatifs dans l’augmentation des financements concessionnels pour les pays les plus pauvres.

La présidence brésilienne a soulevé la question de la crise de la dette, qui touche une grande partie des pays en développement. Toutefois, le communiqué d’octobre indique seulement que les pays s’engagent à remédier aux vulnérabilités de la dette mondiale, sans mentionner spécifiquement l’annulation de la dette, les échanges de dette contre nature et les investissements verts, par exemple. On s’attend à ce que la présidence sud-africaine mette davantage l’accent sur ce sujet, car le pays est directement touché par la crise.

  • Définition de la bioéconomie

Le terme « bioéconomie » peut avoir différentes significations pour différents groupes, ce qui entraîne des contradictions. Une approche peut être principalement extractiviste, axée sur la biotechnologie pour créer des produits à partir de gènes extraits de la nature ou sur l’exploitation à grande échelle des ressources forestières, telles que le bois et d’autres produits, pour remplacer l’acier et le plastique et produire du carburant. D’autres définitions peuvent avoir une conscience écologique et sociale plus prononcée, valorisant le commerce de divers produits de l’écosystème pour préserver la biodiversité et plaidant pour l’utilisation des connaissances traditionnelles associées à la nature comme moyen de valoriser et de protéger les forêts.

Lors du sommet des 18 et 19 novembre, le président Lula, en tant que chef de file du G20, demandera aux dirigeants d’approuver dix « principes de bioéconomie de haut niveau » élaborés par des experts internationaux dans le cadre de l’initiative du G20 en faveur de la bioéconomie (GIB). Ce sera la première fois que la bioéconomie fera l’objet d’un document multilatéral consacré à ce sujet. Bien que ces principes soient « non contraignants », ils devraient servir de base à de futures discussions mondiales, dont la continuité est prévue pour la prochaine réunion du G20 en Afrique du Sud.

Les principes comprennent des paramètres économiques, écologiques et sociaux, englobant la conservation de la biodiversité, la restauration des écosystèmes dégradés, l’adaptation au changement climatique, l’éradication de la faim, la protection des droits des peuples autochtones et l’utilisation équitable des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles.

Ce dernier sujet a été l’un des plus controversés de la COP16. La question de l’information numérique sur les séquences (DSI) a donné lieu à un accord qui reflète en partie les points de vue des pays riches en biodiversité, mais qui attend encore la conclusion de la COP16-Bis pour être mis en œuvre.

Alliance mondiale contre la faim et la pauvreté

L’Alliance mondiale contre la faim et la pauvreté est devenue la priorité absolue du Brésil pendant la présidence du G20. Le lancement officiel aura lieu lors du sommet des dirigeants à Rio de Janeiro le 18 novembre 2024. Le groupe de travail se réunira régulièrement pour définir et ajuster ses lignes directrices et ses stratégies.

L’idée a été présentée pour la première fois lors du sommet du G20 à New Delhi comme une réponse à l’augmentation de la faim et au défi de reprendre les progrès sur les objectifs de développement durable. Les données des Nations unies soulignent l’urgence de cette initiative : 750 millions de personnes sont confrontées à la faim, tandis que 2,4 milliards vivent dans une situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave.

L’Alliance s’articule autour de trois piliers : le pilier national, qui encourage l’adoption de politiques publiques efficaces ; le pilier financier, qui aligne les fonds mondiaux et régionaux pour soutenir la mise en œuvre des programmes ; et le pilier de la connaissance, qui encourage l’assistance technique et le partage d’expériences.

Le groupe de travail de l’Alliance, coordonné par les ministères brésiliens du développement social, des affaires étrangères et des finances, a travaillé avec plus de 50 délégations internationales pour structurer l’initiative. En mai, à Teresina, Piauí, les termes de référence, le cadre de gouvernance et le modèle de déclaration d’engagement de l’Alliance ont été établis. Ces documents ont été officialisés en juillet lors de la réunion ministérielle de Rio de Janeiro, permettant l’adhésion officielle des pays et organisations intéressés.

Ouverte à tous les pays, y compris les membres du G20, l’Alliance vise à créer un portefeuille de politiques publiques éprouvées contre la faim et la pauvreté, inspirées de programmes tels que le plan « Brésil sans faim ». L’initiative encouragera un réseau de pratiques comprenant le soutien à l’agriculture familiale, les repas scolaires et la protection sociale, avec le soutien technique et financier de partenaires.

En octobre, le ministre des affaires étrangères Mauro Vieira a invité les pays à rejoindre l’Alliance en tant que membres fondateurs, soulignant que cette adhésion leur donnerait un accès prioritaire aux partenariats techniques et financiers et leur permettrait d’exercer une influence sur la définition de la gouvernance de l’Alliance.

  • L’expérience brésilienne

Le modèle brésilien de lutte contre la faim met l’accent sur la distribution des revenus plutôt que sur la production alimentaire. Les programmes de protection sociale tels que Bolsa Família, Cadastro Único et le programme de citernes soutiennent directement les familles vulnérables, en particulier les femmes. Bolsa Família est un exemple frappant, qui s’est avéré efficace pour réduire les inégalités. En 2023, une enquête de l’IBGE indiquait qu’un ménage sur cinq bénéficiait de cette prestation, qui a permis de réduire la pauvreté des jeunes enfants de 91,7 %.

On estime qu’en 2023, le Brésil a protégé environ 20 millions de personnes de la faim, inversant ainsi la tendance à la croissance de l’insécurité alimentaire qui avait atteint plus de 33 millions de Brésiliens en 2022. Selon le gouvernement brésilien, ces progrès réduisent la faim et améliorent l’accès à l’emploi et la qualité de vie.

Membres de l’Alliance

Plusieurs acteurs internationaux ont soutenu l’Alliance. Des experts renommés comme Sir David Nabarro (ONU) et Dr. Cynthia Rosenzweig (NASA) ont appelé le G20 à mettre en œuvre des politiques de lutte contre la faim. Des organisations comme l’OEA et la CELAC, et des pays comme l’Allemagne et le Chili, ont déclaré leur adhésion et leur soutien à l’initiative. Les institutions financières internationales et les banques de développement se sont engagées à mobiliser des ressources et à apporter leur soutien par le biais de financements concessionnels et de subventions.